Dans mon jardin il y a des fleurs de papier, il y a le père de ma patrie, il y a l’impatience des impolis et toutes les promesses profondément pétries par des penseurs manchots.
Subrepticement, c’est faux. Je n’ai pas de jardin, on le sait, ça se voit, je me suis égaré chez la voisine, j’ai cru pendant quelques années que j’étais chez moi, mais je m’amenuise.
C’est la vie, c’est la vie, mon ami, c’est la vie de ce siècle, nous la vivons comme des fleurs de papier.
Du fond de son jardin, je l’entends, l’entendez-vous, ma voisine crie que ça n’a pas de sens, pas plus de sens que les autres mots, pas de sens du tout, et même si elle vient tout juste de botter le derrière, elle m’invite à revenir boire chez elle, elle me demande de peindre son portrait, je ne pourrai pas, les pinceaux m’intimident, je préférerais m’allonger sur la terrasse.
Ma voisine a besoin de sucre, elle a besoin de café, j’irai faire ses courses, j’irai même si je ne vois pas pourquoi, je l’oublierai peut-être en chemin, je la laisserai à ses fleurs de papier, à ses histoires qui m’étourdissent, je ne lui écrirai pas, lui écrire, non, si je pars ce sera pour partir.