Vous savez ce qui s’est passé? Non? Eh bien, imaginez-vous que monsieur Duval a mis le feu à sa maison parce qu’il y avait, supposément, des fantômes. Pourtant, nous n’en avons jamais vu, et nous avons passé d’innombrables nuits dans cette maison, à écouter le moindre craquement, à regarder la moindre lueur, tous les sens en éveil. Maintenant, le village raconte que Duval a perdu la tête.
CHOEUR: Pauvre Duval!
Duval, Duval, comment faire pour le sauver? Il erre, sans abri, par les champs et les forêts, hirsutes et en guenilles.
CHOEUR: Pauvre Duval!
J’ai rencontré Duval hier, et il m’a semblé plutôt sensé. Nous avons parlé de tout et de rien, du crapaud de Dominique, de l’obélisque de Louxor, des équations de Yang Mills, et ma foi, il raisonnait comme le Duval qu’il a toujours été, avec finesse et profondeur. Mais quand il a été question des fameux fantômes, il s’est métamorphosé. Ses globules ont gonflé, son ventre s’est mis à gargouiller, et il a émis de longs sifflements qui m’ont, je l’avoue humblement, effrayé au plus haut point. J’ai alors, on s’en doute, voulu clore ce chapitre spectral, mais impossible. Quelque chose en Duval était lancé, il ne se possédait plus, et j’allais fuir, craignant pour ma vie, lorsque soudain, le silence lui est tombé dessus comme une chape de plomb.
CHOEUR: Pauvre Duval!
DUVAL: Oh ça va! Comme si j’étais le seul qui avait brûlé sa maison à cause des fantômes! Merde, vous m’assommez.