Sam enfile son manteau, attrape sa valise, vérifie qu’il a ses clés, son portefeuille, son téléphone, pose la main sur la poignée de la porte, se tourne vivement vers Rad, qui le suivait de l’œil et des pieds.
SAM: Zut. Ma chère, je crois que je serai, compte tenu de l’heure, en retard pour ce rendez-vous que je ne pourrais, pour absolument aucune raison, manquer.
RAD: Dans ces circonstances, et compte tenu des retombées possibles, pour toi, évidemment, mais aussi, par ricochet, pour moi et les enfants, ainsi que pour les amis des enfants, indirectement, il te faut partir promptement afin, si malgré la densité de la circulation, les limites sévères sur la vitesse permise et les imprévus, il est encore possible d’y arriver.
SAM: Tu le penses?
RAD: Je le pense.
Sam pousse la porte, s’élance vers sa Fiat, tourne la clef, tourne encore la clef, tourne encore la clef, la Fiat finit par démarrer, il recule, bute sur une poubelle, marche avant, il cale, redémarre, fonce, brûle un feu rouge, klaxons, il lève un doigt, fonce à nouveau, chapeau des roues, cris, insultes, bouchons, grimpe sur le trottoir, percute un stand à journaux, percute un banc, percute un passant, une passante, un passant, bondit dans la rue, klaxons, fonce sous un semi, perd son toit, accélère, virage serré, une ruelle, file entre chats et rats, aboutit sur un boulevard, contresens, cent mètres, traverse un stationnement, grimpe sur la pelouse du parlement, dégringole l’escalier, freine devant une porte noire, se précipite, ouvre la porte.
SAM: Allo? Rad?
RAD: Allo? Alors?
SAM: Trop tard.
RAD: Faute de dinde, nous mangerons du poulet.
SAM: Aux ananas.