J’adore insulter les gens. Sauf que la plupart du temps, rien ne les insulte. Stoïques. Ils entendent les insultes, mais ne les écoutent pas. Ne réagissent pas. J’adore insulter les gens, mais seulement quand ça les fâche. Sinon, à quoi bon. Par exemple, j’aime bien les comparer à des vaches, des porcs, des chiens, des poules, des rats, des mouches, des pucerons, des virus. Mais ça ne les irrite pas. Au contraire. La plupart du temps, ils aiment ça. Parce qu’ils aiment les virus, les pucerons, les mouches, les rats, les poules, les chiens, les porcs, les vaches. C’est la vie! Qu’ils disent. La vie! Miaou, miaou, wouf, wouf, coin coin, bizz, bizz. Bang! Crevez, sales bêtes. Il n’y a plus rien. Les bêtes, ça finit toujours par crever, avec ou sans aide. Ça crève. Après, les cadavres servent à nourrir une foule d’autres bêtes. Et quand les cadavres sont complètement bouffés, digérés, qu’ils sont nets et luisant d’un grand vide gris, il n’y a alors plus rien de rien. Je me demande si les pucerons s’inventent des contes pour accepter dignement leur destin. Écrasement par un pouce. Je ne crois pas. Faut être passablement dérangé pour s’inventer de ces lubies. Dérangé, oui. Je suis comme les pucerons, et j’adore piquer les gens. Sauf que la plupart du temps, ça ne les trouble pas. Ils se disent qu’ils foncent tout droit vers un monde sans piqûres de pucerons. Moi, pour de vrai, je déteste les piqûres de pucerons. Ça me démange.